''Il n'est pas merveilleux, ce bébé ?'', lança l'homme.
La femme ne répondit pas, et sortit un jeu de tarot afin de lire quelque chose.
Puis, effrayée, elle lâcha :
''Il aura un destin tragique et hors du commun.
-Chérie, arrête de croire ces choses là.''
A ce moment, un bruit se fit entendre.
''Qui est là ?'', menaça l'homme.
Un homme armé d'un révolver surgit et tira une rafale de balles sur les deux personnes. Le sang coulait sur le carrelage. Le bambin baignait dans le liquide rouge, mais restait hypnotisé par lui. Il était muet comme une tombe.
Quelques minutes plus tard, l'assassin du couple quitta la scène de son crime en prenant soin de ne pas salir ses bottes de sang, emportant avec lui 20 kg de cocaïne et un sac rempli de billets. Le tueur partit, le bébé resta seul, dormant comme un loir, dans une flaque de sang.
Ce bébé, qui a dormi dans le sang de ses parents ce soir là, c'est moi. Enfin, c'était moi. La vie m'a transformé. M'a vidé de toute innocence.
J'ai été recueilli par un clochard octogénaire, Charly, qui m'a appris tout ce qu'il savait, en matière d'éducation comme de survie. Le reste, c'est la vie qui m'a forcé à l'apprendre. La détermination, le recul devant rien, la prudence.
La scène du fameux soir était enfouie dans mon subconscient et c'est réveillée à un contact avec le sang étranger. Je me souviens, ce jour, Charly était décédé de vieillesse. Je n'avais plus de tuteur, j'ai du me débrouiller seul, dans les rues mal famées de la Z-City, à 9 ans. J'étais à jeun depuis 2 jours. La faim me tiraillait de le ventre. Fouillant dans les poubelles du parc public, j'ai aperçu un écureuil un peu trop curieux à côté de moi. Je suis rappelé une citation de Charly : ''Tout ce qui peut être mangé doit être mangé. N'aie pas de remords, tu ne fait que te nourrir et subsister.''
J'ai donc pris mon canif, héritage de Charly, instrument indispensable à la survie. Quelques secondes plus tard, le thorax de l'écureuil se fendait sur la pression de mon couteau. Il se débattait , si bien qu'il a fallu que je l'assomme avant que j'en retire les tripes. A ce moment même,alors que mes doigts touchaient le liquide chaud, je tombais à la renverse et était plongé dans de terribles visions.
Un homme et une femme penchés sur un berceau. Des coups de feu. Des cris. Du sang qui se répand. Un bébé qui hurle. Du sang. Beaucoup de sang. Une lumière intense. Des pleurs. Du sang.
Je me réveillait dans un lit d'hôpital, avec une sonde gavante plantée dans les veines. Il fallait que je sorte de là. Me nourrir de cette façon était beaucoup trop facile.
Vous me trouvez horrible ? La faute à qui ? À la vie. Elle s'acharne tel un vautour sur un cadavre rapiécé. Je donne un conseil à la police : n'essayez pas de jouer avec mes sentiments, je n'en ai pas. Donnez moi une heure, je suis fort. Donnez moi un jour, je suis imbattable. Donnez moi un mois, je dépasse vos pensées.
Tcheuksse. [Ainvicybleu]